Langues autochtones au Parlement --comparaison entre le Canada et l'Australie.

AuthorGoodwin, Timothy B.
PositionArticle Vedette

En mai 2017, Robert-Falcon Ouellette a prononcé un discours à la Chambre des communes du Canada sur la violence au sein des communautés autochtones. M. Ouellette s'est exprimé en langue crie, car il voulait > et communiquer avec la population plus jeune (1). Bien que M. Ouellette ait contacté le bureau parlementaire compétent à l'avance et ait fourni le texte anglais du discours, aucune interprétation simultanée n'a été proposée du cri vers l'anglais. Si l'utilisation du cri par M. Ouellette n'a pas enfreint le Règlement, elle a mis en évidence le fait qu'il n'existait aucun mécanisme permettant de faire interpréter simultanément ses paroles afin que les autres députés puissent le comprendre. Après le discours, M. Ouellette s'est opposé au statu quo et le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre a mené une enquête sur l'utilisation des langues autochtones dans les délibérations de la Chambre et des comités (2). Au cours de cette enquête, le comité a recueilli les témoignages de 31 témoins, dont le dernier provenait d'Australie, à quelque 15 000 kilomètres de là. Ce témoin, Michael Tatham, greffier de l'Assemblée législative du Territoire du Nord, a expliqué dans quelle mesure le Parlement du Territoire du Nord prenait en compte les langues autochtones. Le témoignage de ce témoin australien éloigné devant le comité, et l'inclusion de son témoignage dans le rapport final, suggère que, bien qu'il existe des différences significatives entre les obstacles à l'implication parlementaire des Autochtones au Canada et en Australie, il existe aussi potentiellement des expériences communes. Dans le présent article, nous espérons décrire la situation actuelle en Australie en ce qui concerne l'utilisation des langues autochtones au Parlement, en évoquant l'importance symbolique de faciliter l'utilisation des langues autochtones, les avantages pratiques qui en découlent et les questions logistiques, notamment l'interprétation, la traduction, l'enregistrement et le financement, qui se posent. Au cours de notre discussion, nous nous sommes concentrés en particulier sur les développements récents et, lorsque cela était possible, nous avons établi des comparaisons avec l'expérience canadienne.

Langues autochtones en Australie, comparées au Canada

Les Autochtones représentent environ 3 % de la population australienne, bien que ce pourcentage soit considérablement plus élevé dans certains Etats, tels que le Territoire du Nord (où les Autochtones représentent environ 35 % de la circonscription) (3). Au Canada, à titre de comparaison, les Autochtones représentent 4,9 % de la population, mais constituent une majorité de la population dans certains territoires (par exemple, les Autochtones représentent 86 % de la population du Nunavut et 51 % de la population des Territoires du Nord-Ouest) (4).

Environ 18 % des Australiens autochtones parlent une langue autochtone, et 11 % parlent à la maison principalement une langue autochtone (5). Là encore, cette proportion est nettement plus élevée dans certains endroits, notamment dans les régions éloignées (où plus de la moitié des Autochtones parlent une langue autochtone) (6). Au Canada, 16 % des Autochtones parlent une langue autochtone (7).

On estime qu'il y a actuellement environ 141 langues autochtones parlées dans toute l'Australie (8). Au Canada, ce chiffre est supérieur à 70 (9). Toutefois, nombre de ces langues ne sont parlées que par un nombre relativement restreint de personnes et même les langues > sont menacées de disparition (10). Au cours des dernières décennies, le public, en particulier les Australiens non autochtones, a pris de plus en plus conscience de l'importance de la préservation et de la protection des langues autochtones. Cette reconnaissance a entraîné des évolutions importantes, notamment l'élaboration d'une législation et d'une politique de protection des langues autochtones (11) et l'inclusion limitée de certaines langues autochtones dans les programmes scolaires.

Les langues autochtones d'Australie partagent avec le Canada trois importantes similitudes qui ont une incidence sur l'histoire des langues autochtones dans les procédures parlementaires. Premièrement, les Autochtones représentent une proportion relativement faible de la population nationale dans les deux pays. Deuxièmement, l'Australie et le Canada étant des fédérations, les Autochtones représentent une part importante de la population dans certaines juridictions infranationales. Troisièmement, il n'existe pas de langue autochtone commune dans les deux pays, mais plutôt une riche diversité de langues. A chacun de ces trois égards, le Canada et l'Australie peuvent être comparés à la Nouvelle-Zélande, qui est une juridiction unitaire avec une population autochtone importante et une seule langue (12).

Langues autochtones dans les parlements australiens

Les Autochtones australiens sont confrontés à des obstacles électoraux depuis la création de l'Australie, mais depuis l'élection du premier Autochtone australien au parlement fédéral en 1971, la représentation électorale a augmenté de façon relativement constante (13). La première utilisation d'une langue autochtone dans un parlement australien semble avoir eu lieu en 1981 (14). Depuis, l'Australie a connu une augmentation spectaculaire de l'utilisation des langues autochtones dans les parlements australiens.

De nombreuses utilisations des langues autochtones dans les parlements australiens ont lieu dans un contexte cérémonial, symbolique ou formel. Par exemple, de courtes expressions en langues autochtones sont souvent utilisées, y compris par des parlementaires non autochtones, dans les remerciements au début des discours...

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