Point de vue quebecois sur les femmes en politique.

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À l'Assemblée nationale du Québec, on compte présentement 40 élues sur les 122 députés actuels. La progression du nombre de femmes élues entre le scrutin de novembre 1998 et celui d'avril 2003 a été remarquable, avec une augmentation de 7,2 p. 100. Il s'agit de la deuxième plus forte augmentation de l'histoire parlementaire du Québec moderne. Malgré ce progrès considérable, les femmes occupent encore beaucoup moins de postes importants. L'auteure examine certains obstacles à l'augmentation du nombre de femmes dans la sphère politique, y compris dans l'organisation des partis politiques et le système électoral. Elle se penche également sur l'impact de l'entrée en politique des femmes et sur quelques initiatives gouvernementales récentes au Québec.

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Je vous présente certains facteurs qui peuvent nuire à la progression de l'engagement des femmes en politique québécoise. Les barrières institutionnelles constituent le premier. Je rappellerai ici que le système politique a érigé traditionnellement des obstacles à la poursuite d'une carrière politique par une femme, puisqu'il s'inspire de valeurs qui font large place au conflit et, naturellement, à l'exercice d'un pouvoir coercitif, alors que les femmes préfèrent, en général, la discussion et la recherche du consensus. De prime abord, le système politique n'est sans doute pas aussi attrayant pour [es femmes que pour les hommes. Lors d'un symposium de l'Union interparlementaire, datant déjà de 1989, il a été dit, de façon lapidaire, que >1.

En 1994, le Conseil du statut de la femme a même évoqué l'existence possible d'une > qui limiterait l'évolution des institutions et de la culture politique et du nombre de femmes au pouvoir. Le Conseil ne s'est pas prononcé sur l'existence d'une conspiration; il a simplement rapporté cette explication développée par certains chercheurs et chercheuses.

En 2003, le Secrétariat à la condition féminine du Québec a relevé l'opinion de femmes et de groupes de femmes selon laquelle le système politique, en accordant la priorité au développement économique plutôt qu'au progrès social, se montre inhospitalier et peu accessible aux femmes, qui ont des valeurs et Luvrent plutôt dans des milieux >, notamment, la santé, les services sociaux et l'éducation.

La discipline de parti et les luttes d'opinions au Parlement jouent aussi un rôle, en limitant les possibilités des femmes de se regrouper avec les membres des autres partis pour détendre des enjeux plus proprement féminins. Cependant, la discipline de parti peut, en même temps, représenter un avantage à la représentation des femmes, dès lors que des militantes obtiennent l'inscription d'une question au programme de leur parti que tous, femmes et hommes, devront ensuite défendre.

Le sexisme à l'endroit des candidates à l'investiture d'un parti n'est pas complètement disparu. Par exemple, le sexisme prendra la forme de manLuvres pour discréditer une femme au foyer voulant se porter candidate. Le sexisme serait d'autant plus présent que l'on juge la circonscription convoitée comme pouvant être remportée par le parti. Toutefois, il n'est pas coutume au Québec d'offrir aux femmes de se > dans des circonscriptions perdues d'avance.

Le type d'emploi ou le prestige de l'emploi occupé compte naturellement beaucoup dans la recherche de candidats et de candidates réalisée par les cadres des partis. Comme les femmes ont un taux d'activité rémunérée moindre que les hommes et qu'elles sont moins nombreuses à occuper des postes de gestionnaire, elles sont également moins en mesure de développer la notoriété professionnelle que recherchent les partis politiques. Les militants d'un parti donné sont donc beaucoup plus souvent sollicités pour poser leur candidature que les militantes.

Les barrières économiques représentent un deuxième facteur. En 1988, une recherche menée auprès d'élues à l'Assemblée nationale et au Conseil de ville de Montréal a conclu que le financement de l'investiture au sein d'un parti ou de l'élection ne constitue pas un obstacle majeur pour les Québécoises qui veulent s'engager en politique. À ce titre, les Québécoises disposent probablement d'un avantage sur les Canadiennes en général. En effet, les travaux de la Commission royale sur la réforme électorale et le financement des partis (la > de 1991) ont révélé que, dans le contexte d'une élection fédérale, l'investiture est jugée par plusieurs femmes beaucoup plus difficile que l'élection elle-même.

On peut penser que, depuis 1977, l'application des règles de financement de la Loi électorale du Québec a eu un effet positif sur la façon d'agir des partis politiques en matière de sélection de candidates. En effet, les principaux partis politiques du Québec ont adopté des règles qui limitent les dépenses des candidates et des candidats à l'investiture, afin de conserver ces dépenses dans des limites acceptables. Ainsi, un candidat ne peut s'appuyer sur une fortune personnelle pour se faire une place en politique.

Depuis 1977, seuls les électrices et les électeurs peuvent contribuer au financement des partis politiques, puisque la Loi électorale prohibe de façon complète les contributions des personnes morales (soit les compagnies et sociétés, les syndicats ou les associations). La Loi établit en outre un plafond aux contributions individuelles de 3000 S par personne par année, limite les dépenses électorales des partis et des candidats et prévoit, à certaines conditions, le remboursement des dépenses électorales et le financement des partis.

Les barrières culturelles constituent un troisième facteur. Encore aujourd'hui, les obligations de la vie privée ou familiale pèsent davantage sur les femmes que sur les hommes et plusieurs d'entre elles peuvent se voir limitées dans leur pleine disponibilité pour la vie publique. Dans une enquête réalisée auprès de députés à Ottawa et à Québec et publiée en 1999, plusieurs femmes ont déclaré qu'elles avaient retardé leur entrée en politique pour veiller aux soins et à l'éducation de leurs enfants. Par contre, aucun député de sexe masculin ne s'est trouvé dans la même situation.

La citation suivante d'un document publié par l'Union européenne décrit peut-être assez bien la situation vécue au Québec : > On doit noter...

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