A la pointe du changement? : la Chambre d'assemblee de la Nouvelle-Ecosse.

AuthorSmith, Jennifer

Depuis 1989, il y a eu cinq élections générales dans la province, mais seulement deux gouvernements majoritaires. En 1998, 2003 et 2006, les électeurs ont élu des gouvernements minoritaires, dont le gouvernement progressiste-conservateur actuel, dirigé par le premier ministre Rodney MacDonald. On comprendra aisément que la dynamique créée par la présence de gouvernements minoritaires successifs a provoqué, à la Chambre d'assemblée, des changements dignes de mention. Parmi ceux-ci, on peut citer l'obligation du parti au pouvoir de collaborer avec les chefs des autres partis politiques pour obtenir leur appui aux fins de la réalisation du programme législatif du gouvernement; le rôle renforcé, dans le cadre du processus législatif, de comités aux sein desquels l'opposition est mieux représentée que le gouvernement," enfin, l'importance accrue de chaque député, compte tenu, tout simplement, de la situation minoritaire à la Chambre. Le présent article examiner les caractéristiques sociodémographiques des députés, les services et les installations accessibles aux députés et aux caucus des partis, ainsi que la relation entre le gouvernement et l'opposition, y compris la sélection du président et des membres des comités législatifs et la productivité de la législature. Les auteures concluent par une évaluation des forces et des faiblesses de la Chambre d'assemblée perçue comme une institution législative de plein droit, dans le climat créé par les attentes actuelles en matière de démocratie.

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La Nouvelle-Écosse est une pionnière de la démocratie parlementaire au Canada. En 1758, une assemblée élue fut constituée à Halifax, la première sur le territoire colonial britannique qui allait devenir le Canada. Quatre-vingt-dix ans plus tard, la Nouvelle-Écosse marqua un autre point en adoptant le système du gouvernement responsable, qui impose au gouvernement l'obligation d'obtenir l'appui de la majorité au sein de la législature pour rester au pouvoir.

Même si les grandes batailles de ce genre sont chose du passé, la Chambre d'assemblée demeure une pionnière dans d'autres aspects du gouvernement parlementaire. La retransmission télévisée des débats compte parmi les questions d'importance débattues ces dernières années. L'un des radiodiffuseurs privés du pays voulut filmer les débats à la Chambre à partir de la tribune du public en utilisant son propre matériel. Le président rejeta la demande, prétextant que cette activité interférerait avec le décorum et la conduite ordonnée des affaires de la Chambre. Le radiodiffuseur contesta le refus devant les tribunaux, alléguant la violation des libertés fondamentales garanties par la Charte canadienne des droits et libertés, en l'espèce la liberté de presse. Les deux divisions de la Cour suprême de la Nouvelle-Écosse (première instance et appel) prirent le parti du radiodiffuseur, mais le président en appela de leur décision devant la Cour suprême du Canada. Entre-temps, la Chambre autorisa ses propres caméras à enregistrer une partie des débats, les bandes films étant mis à la disposition des médias à des fins de télédiffusion.

En 1993, dans New Brunswick Broadcasting Co. C. Nouvelle-Écosse (Président de l'Assemblée), aussi connue comme l'affaire Donahoe du nom du président de la Chambre, Arthur Donahoe, le tribunal statua que le privilège parlementaire--le privilège de la législature de contrôler ses propres débats--faisait partie intégrante de la tradition constitutionnelle. Il établit que l'exercice par la législature du privilège historique d'exclure des étrangers était reconnu par la constitution et se situait donc hors de portée de la Charte. Par conséquent, la Chambre d'assemblée continua de coordonner la diffusion et l'enregistrement de ses débats, les rendant accessibles au public et aux médias dans une gamme de formats.

Un autre effort de réforme démocratique digne de mention remonte à l'administration de John Savage, premier ministre et chef d'un gouvernement libéral majoritaire entre 1993 et 1998. En dépit du prix politique considérable qu'il paya et du succès mitigé qu'il remporta, il s'est attaqué à la réputation acquise par la province en raison du recours peu subtil aux nominations partisanes aux fins de l'administration gouvernementale. Il instaura plutôt un système de nomination fondé sur le mérite. Une des principales innovations du système concernait les nominations au conseil d'administration des organismes, commissions et conseils (OCC) gouvernementaux, l'ingrédient de base du patronage.

Selon l'ancien système, les décisions relatives à ces nominations étaient prises en coulisse à la discrétion du gouvernement, souvent (bien que pas toujours) à partir de considérations partisanes. En fait, la nomination partisane, dans le cadre du système de favoritisme en place, était ancrée dans la culture politique de la province. Sous l'influence de la stratégie de Savage, l'offre d'emplois fit l'objet d'annonces publiques et les candidats intéressés furent invités à poser leur candidature. De plus, les règles de la Chambre d'assemblée furent modifiées pour permettre au comité permanent des ressources humaines de voter pour la nomination des candidats proposés par les ministres ou le cabinet. En d'autres termes, le comité permanent avait désormais le pouvoir d'opposer son veto aux nominations ministérielles, une pratique unique au Canada et au sein des systèmes britanniques de gouvernement parlementaire.

La Chambre d'assemblée continue d'occuper une place pivot au sein du gouvernement et des politiques de la province. C'est le noyau démocratique du processus politique. Elle évolue en réaction aux attentes du public à l'endroit des normes qui délimitent le rôle du représentant élu. Elle s'adapte au changement technologique et, lentement, sa composition commence à refléter les efforts déployés par les femmes pour embrasser une carrière politique.

Caractéristiques sociodémographiques des députés

Vingt-six femmes ont été élues à la Chambre d'assemb1ée de la Nouvelle-Écosse. Actuellement, 9 députés sur 52 sont des femmes (17%)--un record sans précédent pour la province. Seules deux provinces--l'Alberta et le Nouveau-Brunswick --ont une note moins élevée à ce chapitre, mais juste par quelques points de pourcentage. Parmi les femmes élues en 2006, 3 sont ministres du cabinet conservateur, 5 sont députées du Nouveau Parti démocratique et 1 est députée du Parti libéral. Il est intéressant de noter que sur les 26 femmes élues en Nouvelle-Écosse, 10 sont des néo-démocrates. Il s'agit là d'une performance impressionnante, compte tenu du fait que ce parti n'avait réussi à faire élire qu'une poignée de candidats par élection avant sa percée en 1998.

Gladys Poirier, du Parti progressiste-conservateur, est la première députée de la Chambre d'assemblée; elle a été élue en 1960. La députée ayant eu le plus long mandat est Alexa McDonough, qui a passé 14 ans à la Chambre (de 1981 à 1995). Elle a été élue à la tête du parti en 1980, a démissionné en 1994 et est devenue chef du NPD fédéral l'année suivante, après la démission d'Audrey McLaughlin. Mme McDonough a passé ses trois premières années à la Chambre d'assemblée de la Nouvelle-Écosse comme seule femme député et seule membre du caucus du NPD. La faveur populaire du parti ne s'est pas améliorée de manière significative pendant son mandat et elle n'a jamais eu plus de deux collègues.

Sur le plan de la formation, de l'éducation et de l'expérience professionnelle, la Chambre d'assemblée actuelle est un mélange éclectique. Nombre d'entre eux peuvent faire état de décennies de bénévolat et plusieurs ont de l'expérience dans plusieurs domaines professionnels. Plus d'une douzaine sont des enseignants ou des professeurs; presque 20 % ont une entreprise, 5 ont une formation en droit et 3 sont des pêcheurs. On pourrait affirmer que rien n'a changé radicalement depuis 1989, année oø Adamson signalait que la Chambre comptait 12 professeurs et 12 chefs d'entreprise (1). Toutefois, la description de la Chambre comme un > requiert une explication. Il n'y a jamais eu de député provincial mi'kmaq. Toutefois, en 1993, Wayne Adams fut élu; c'était le premier député noir de la province. Nommé ministre, il assuma d'abord les fonctions de ministre de l'Approvisionnement et des Services pour le premier ministre Savage et, ensuite, celles de ministre de l'Environnement. Adams avait remporté sa victoire dans la circonscription de Preston récemment constituée et dont la population comprenait une proportion significative de citoyens de race noire. Un éditorialiste du Globe and Mail fustigea le gouvernement pour avoir établi ce qu'il appelait une >, déplorant à tort que > (2). Compte tenu des faits, ce n'était pas une hypothèse déraisonnable. Toutefois, il faut souligner que la nouvelle circonscription de Preston avait été établie par la première commission de délimitation des circonscriptions électorales indépendante de la province et qu'à l'époque, environ un tiers de ses habitants étaient noirs. Ce nombre ne conférait pas à la circonscription un > mais il était suffisant pour donner à la collectivité une occasion réaliste de faire élire un député noir. Adams perdit son siège en 1998 aux mains de la candidate du NPD, Yvonne Atwell, première députée noire de la Chambre d'assemblée. Percy Paris, de Waverly-Fall River-Beaverbank, est le seul député noir de la législature provinciale actuelle.

Ressources des députés et des caucus des partis

Au mois de janvier 2007, le salaire de base des députés était de 81 805 $. Cela représente une augmentation notable par rapport à l'année précédente, alors que les députés de la Nouvelle-Écosse ne gagnaient que 65 556 $ et venaient au troisième rang des députés les plus mal payés des assemblées législatives provinciales au pays. En février 2006, le président de la Chambre, Murray Scott, nomma une commission d'enquête de trois membres pour étudier la question du salaire des députés...

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