De La Théorie Des Troubles de Voisinage en Matière de Recours Collectif ; un Débat Clos?

AuthorAbraham A. Tachjian
Pages459-491
459
ABSTRACT
Abraham A. Tachjian1
While the neighbourhood annoyance theory can be traced back over a
hundred years, it was not until the Civil Code of Quebec that the legis-
lature created a specific article to deal with it. Despite the fact that the
theory is over a century old, authors and judges have yet to agree on
whether article 976 C.c.Q. requires the claimant to establish fault, or if it
provides for no-fault liability.
In the meantime, a new question has been raised regarding the appli-
cation of the neighbourhood annoyance theory in the context of a class
action lawsuit. This article studies the relationship between these two
concepts, and concludes that, contrary to two recent decisions from the
Quebec Court of Appeal, neighbourhood annoyances can be used in class
action lawsuits and no proof of fault is required.
1 Abraham A. Tachjian is a graduate of the Université de Montréal, faculty of law
and is currently an articling student with BCF LLP in Montreal. He would like
to thank his friends and family members for their support during the prepara-
tion of this article.
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DE LA THÉORIE DES TROUBLES
DE VOISINAGE EN MATIÈRE DE
RECOURS COLLECTIF; UN DÉBAT
CLOS?
Abraham A. Tachjian1
A. INTRODUCTION
Le Québec est considéré par plusieurs comme étant un paradis pour les
recours collectifs. Encadrée par des règles procédurales qui favorisent les
requérants, cette procédure est devenue l’outil de choix pour plusieurs
citoyens cherchant à faire valoir leurs droits devant les tribunaux de la
province. On remarque qu’à chaque semaine, un nouveau recours est
intenté par une personne ou un groupe de protection de consommateurs
au nom de ceux qui ont subi des dommages similaires. À l’instar de ces
décisions, les entreprises qui font l’objet de ces recours risquent non
seulement des millions en dommages, mais aussi une perception néga-
tive dans le marché. Les nombreux domaines dans lesquels ces actions
trouvent application ne font que contribuer à leur popularité.
L’avantage des parties demanderesses n’est pas limité à des disposi-
tions procédurales. Il existe aussi des lois qui reconnaissent la respon-
sabilité d’une défenderesse même en l’absence de faute; ayant pris toutes
les mesures nécessaires pour éviter un préjudice, une partie peut néan-
moins se voir condamner à des dommages et intérêts dans la mesure où
la requérante a subi des dommages. C’est notamment le cas dans la théo-
rie des troubles de voisinage codifiée à l’article 976 C.c.Q. On remarque
que les défendeurs se retrouvent dans une situation indésirable.
En octobre 2006, la Cour d’appel a rendu deux décisions dans les-En octobre 2006, la Cour d’appel a rendu deux décisions dans les-
quelles elle a limité le champ d’application des recours collectifs. Dans les
1 Abraham A. Tachjian est diplômé de la faculté de droit de l’Université deAbraham A. Tachjian est diplômé de la faculté de droit de l’Université de
Montréal et est actuellement stagiaire au sein du bureau montréalais de BCF
s.e.n.c.r.l. Il aimerait remercier ses amis ainsi que les membres de sa famille
pour leur appui pendant la rédaction de ce texte.
VOL UME 4, No 2, march 2008 461
arrêts Ciment du St-Laurent inc. c. Barrette2 et Comité d’environnement de
Ville-Émard (CEVE) c. Domfer Poudres métalliques ltée,3 la Cour d’appel a
statué que le régime de responsabilité applicable en matière de troubles
de voisinage est celui de la faute prouvée. Dans l’arrêt Barette,4 elle a
ajouté que l’article 976 C.c.Q. ne pouvait servir de fondement pour un
recours collectif.
Notre objectif est donc d’étudier la théorie des troubles de voisinage
dans le contexte de recours collectif. À cet effet, nous croyons que malgré
ces deux arrêts, l’article 976 C.c.Q. n’exige pas la preuve d’une faute et
qu’il reste toujours un outil utile en matière de recours collectif.
En vue de soutenir l’hypothèse suggérée, le texte abordera une
analyse tripartie. La première partie sera consacrée à l’étude de l’article
976 C.c.Q. Elle détaillera les composantes de la théorie des troubles de
voisinage, soit les éléments matériels et les éléments substantiels. Par
éléments matériels, nous envisageons les conditions d’application de la
théorie, c’est-à-dire ce qu’on perçoit par le terme « voisin » et les recours
disponibles à ceux qui subissent des troubles de voisinage. Par éléments
substantiels, nous comprenons les sources juridiques qui ont servi de
fondement pour cette théorie et leur évolution jurisprudentielle.
La deuxième partie du texte traitera de la controverse relative au
régime de faute applicable. À cet effet, le débat doctrinal entre les tenants
d’un régime de faute prouvée et ceux favorisant une responsabilité sans
faute sera présenté, ainsi que les motifs qui les amènent à préférer un
régime plutôt que l’autre. Subséquemment, ce même débat sera exposé
du point de vue de la jurisprudence.
La dernière partie du texte sera dédiée aux développements récents
en matière de troubles de voisinage et de recours collectif. S’inspirant
de l’arrêt Barrette,5 elle débutera en récapitulant les faits de l’arrêt et le
raisonnement qui ont été rendus dans la décision. La deuxième section
analysera cet arrêt et sera elle-même subdivisée en trois sections. La pre-
mière section renforcera l’importance de l’arrêt Drysdale c. Dugas6 comme
étant une décision fondamentale en ce qui concerne le régime de faute
applicable. La deuxième section traitera des rapports de droit en matière
de troubles de voisinage et leur impact dans le contexte des recours
2 [2006] J.Q. no 13603 (C.A.), confirmant [2003] R.J.Q. 1883 (C.S.) [[2003] R.J.Q. 1883 (C.S.) [Barrette].
3 [2006] J.Q. no 13631 (C.A.) [Domfer].
4 Précité note 2.récité note 2.
5 Ibid.
6 [1896] 26 R.C.S. 20 [[1896] 26 R.C.S. 20 [Drysdale].

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