Une éducation pratique en politique : Programme de stages législatifs du Nouveau-Brunswick (PSLNB).

AuthorBateman, Thomas M.J.

Des programmes comme le Programme de stages législatifs du Nouveau-Brunswick (PSLNB) sont justifiés en grande partie sur le plan de la recherche d'emploi, transformant les universités en collèges professionnels haut de gamme. L'intérêt d'un baccalauréat, selon ce point de vue, est d'obtenir un bon emploi, et l'administration universitaire promeut l'idée que les candidats en ont pour leur argent. Cependant, le PSLNB ne s'intéresse pas seulement aux possibilités d'emploi. Il est plutôt conçu pour que les participants apprennent ce que suppose une bonne formation, correcte et précise, en matière de politique et de gouvernement. Dans cet article, l'auteur rend compte des efforts déployés pour établir un programme de stages législatifs au Nouveau Brunswick et explique pourquoi le but premier d'un stage consiste à approfondir la compréhension qu'a un étudiant de sa matière, à savoir la politique et le gouvernement. Il offre également quelques suggestions pour d'autres personnes qui pourraient être intéressées par le lancement d'un programme de stage ailleurs.

L'étude de la politique

Un de mes collègues a eu une caricature sur sa porte pendant de nombreuses années. Un homme postule pour un emploi. Le responsable des ressources humaines demande : > Sa réponse : > Le responsable des RH répond : >

Voilà qui résume bien notre problème actuel. Un diplôme en sciences politiques est, comme on dit, > : il ne vous permettra pas d'obtenir un emploi rémunéré. En ce sens, l'énigme de la science politique est celle des arts libéraux en général. Dans un monde de plus en plus dominé par des travaux hautement techniques et mathématisés, une formation générale en sciences humaines est inutile. Les disciplines qui étudient les humains n'ont une chance que dans la mesure où elles adoptent les méthodes mathématisées facilitant la connaissance à des fins de contrôle, et donc d'exploitation à des fins commerciales. George Grant a examiné ce virage il y a longtemps.

Au fur et à mesure que cette vision de l'objectif des arts libéraux s'est imposée, les administrateurs universitaires ont fébrilement tenté d'assurer aux parents que les diplômes de leurs enfants leur permettront en fait de vivre confortablement. > Les étudiants en arts acquièrent des > et la capacité de communiquer. Il s'agit de compétences universelles facilement transférables à d'autres domaines d'activité et à d'autres sources de revenus.

Par ailleurs, dans une salle de classe de sciences politiques, les professeurs sont en proie à un paradoxe. Ils sont confrontés à des étudiants ayant peu de connaissances de la politique en tant qu'activité pratique et, en fait, peu de connaissances de l'histoire pour étayer la myriade de particularités qui composent l'étude de la politique. Il existe un réel sentiment que les nouveaux étudiants sont trop jeunes, qu'ils ne sont pas exposés aux personnes, aux événements, à la vie et à la discorde qui stimulent une appréciation des possibilités et, plus important encore, des limites de la politique. En effet, un nombre étonnamment élevé d'étudiants de premier cycle en sciences politiques ne s'intéressent pas à la politique. Ils ne lisent pas les journaux ou les biographies politiques, ne suivent pas les grandes crises et les grands événements, ne parlent pas de politique avec leurs amis et ne saisissent pas les innombrables occasions qui leur sont offertes d'engager le dialogue avec leurs représentants élus et de participer à toutes sortes de processus de politique publique.

Le message que de nombreux étudiants reçoivent de leurs professeurs est que les pratiques réelles et les particularités de la politique ne sont pas aussi importantes que les points de vue théoriques dont un étudiant a besoin pour analyser et comprendre la politique. De même, pour de nombreux professeurs d'anglais, la lecture de la littérature est loin d'être aussi précieuse que l'apprentissage des théories critiques qui doivent être apportées à la lecture de la littérature. J'ai assisté à de nombreuses conférences universitaires au cours desquelles l'auteur d'un article commence par exposer son > pour ensuite l'appliquer à un phénomène politique de son choix.

Cela me semble mettre la charrue avant les boeufs. Autrefois, c'était le cheval qui tirait la charrette. La Politique d'Aristote combine subtilement le sens du meilleur régime avec une attention soutenue aux détails et à ce qui est réalisable et durable, et non simplement à ce qui est idéal. Comme il le dit dans le livre IV, >. Il a suivi une méthode fondamentalement comparative, examinant les cas existants et formulant ainsi des généralisations.

Comment avons-nous quitté les rails? Isaiah Berlin suggère que la prééminence et le succès des sciences naturelles depuis Francis Bacon ont tenté les savants d'appliquer les mêmes méthodes aux choses humaines, en espérant les mêmes résultats de connaissance et de contrôle. Imaginez une société dont les mouvements seraient aussi prévisibles que ceux des planètes, ou que ceux des organes corporels sous l'influence de tel ou de tel aliment ou traumatisme. Voici ce qu'écrit M. Berlin :

Des prédicateurs messianiques, des prophètes, tels que Saint-Simon, Fourier, Comte, Marx, Spengler, des penseurs théologiques à l'esprit historique, de Bossuet à Toynbee, les vulgarisateurs de Darwin, les adaptateurs de telle ou telle école dominante de sociologie ou de psychologie, tous ont tenté de combler la brèche causée par l'échec des philosophes du 18e siècle à construire une science de la société appropriée et réussie. Chacun de ces nouveaux apôtres du 19e siècle a revendiqué la possession exclusive de la vérité. Ce qu'ils ont en commun, c'est la croyance en un grand modèle universel et en une méthode unique pour l'appréhender, dont la connaissance aurait évité bien des erreurs aux hommes d'État et bien des tragédies à l'humanité (1).

Bien sûr, si les scientifiques connaissent les lois internes de la société, pourquoi devraient-ils se contenter de conseiller l'homme d'Etat? Pourquoi ne devraient-ils pas eux-mêmes gouverner? La réponse pour M. Berlin vient de notre expérience. Gouverner au moyen de > scientifiques connues d'une élite signifie la mort de la politique et l'avènement d'un régime totalitaire.

Le point principal de M. Berlin est que les hommes politiques, les bons, ceux que nous appelions autrefois les hommes d'État, >. Ils sont très sensibles aux particularités de la vie politique et s'abstiennent d'imposer au monde social un modèle homogène vanté par un compte rendu scientifique, faux ou non. Ils ont une capacité de synthèse supérieure à celle de l'analyse, >. Cela corrobore le discours d'Aristote selon lequel les entités politiques sont nécessairement pluralistes, et non homogènes. Si elles ne l'étaient pas, elles seraient des familles ou des goulags infernaux, et non des communautés politiques. Dans La Nouvelle Atlantide de Bacon, les élites scientifiques dirigent la société bien ordonnée, mais cette technocratie est totalitaire : il n'y a pas de liberté, pas de remise en question de la direction de la société, pas de politique.

Je suis d'accord avec Bernard Crick, pour qui la politique n'est pas un épiphénomène de la lutte des classes, du patriarcat ou d'un autre totalisme idéologique. Il s'agit de sa propre activité humaine (limitée), dans laquelle les personnes sont confrontées à la liberté des autres, à la réalité pressante de la rareté, aux contraintes, aux compromis et aux coûts de renonciation. Il s'agit de l'activité dans laquelle les pluralités et les particularités fondamentales doivent être gérées, et non écrasées. C'est le royaume des mesures d'adaptation, des compromis, des suspensions et des ajustements, à la fois moraux et pratiques (3).

Graham Steele a été député provincial et ministre du gouvernement de la Nouvelle-Écosse pendant de nombreuses années. Depuis qu'il a quitté la politique active, il a écrit des livres débordant d'un réalisme grinçant né des réalités pratiques quotidiennes de la représentation des personnes à l'Assemblée et au gouvernement. Ses livres sont légers sur le plan de la >, mais ils démontrent bien les pressions conflictuelles qui pèsent sur les députés qui ont peu de temps, trop peu de ressources, trop d'exigences et des attentes très élevées qui leur sont imposées de toutes parts (4). Ses livres portent sur le monde réel de la politique démocratique et constituent une lecture essentielle pour tout étudiant en politique.

La lecture est bonne et nécessaire. Les conférences peuvent être très...

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