La convention sur la confiance s'applique-t-elle à un gouvernement de consensus?

AuthorBrock, David M.

Le gouvernement de consensus dans les Territoires du Nord-Ouest doit fonctionner >. Ça ne veut pas nécessairement dire que tous les éléments d'un gouvernement responsable s'appliquent de la même manière qu'ils pourraient l'être dans un système de partis. L'une des zones d'incertitude réside dans l'application de la convention sur la confiance. Cette dernière prévoit que si l'exécutif n'a plus l'appui de la majorité des membres de l'assemblée législative, le gouvernement doit démissionner ou bien demander la dissolution et la tenue d'une élection générale. Mais comment cela peut-il fonctionner dans le régime de gouvernement par consensus en place dans le Nord?

L'interprétation et l'application de la convention sur la confiance dans un système de partis de type Westminster sont déjà complexes. Nous savons que, de façon générale, le chef du parti politique qui compte le plus de représentants au sein de l'assemblée législative est habituellement appelé par le représentant de la Couronne à former le gouvernement. Cette décision se fonde sur la probabilité que ce même chef de parti puisse conserver durablement l'appui d'une majorité de députés. Là où l'application de la convention sur la confiance se complique toutefois, c'est lorsque vient le temps de déterminer en quoi consiste exactement un vote de défiance, si un vote de défiance est véritablement un signe de l'incapacité du gouvernement à gouverner de façon responsable et s'il y a lieu d'accepter une demande de prorogation.

Dans le régime de gouvernement par consensus comme celui en vigueur dans le Nord, où la constitution des gouvernements et la façon dont ceux-ci rendent des comptes sont différentes, il est encore plus déroutant d'essayer de comprendre l'interprétation et l'application possibles de la convention sur la confiance. Dans le régime de gouvernement par consensus, tout comme le système de partis, le gouvernement est nommé par l'organe exécutif officiel et les membres du conseil rendent compte à la Chambre. Le mode de sélection des membres du Conseil exécutif diffère toutefois sensiblement et peut-être en conséquence. Dans un système de partis, le choix des ministres est la prérogative de la Couronne, qui agit sur l'avis du premier ministre. Dans un régime de gouvernement par consensus, le choix des ministres, y compris celui du premier ministre, est la prérogative de la Chambre. La façon dont le Conseil exécutif est choisi peut donc influencer la décision quant à la question de savoir comment--et si--le Conseil exécutif peut être destitué en bloc et, plus important encore, si la Chambre peut être dissoute et si une élection générale peut avoir lieu avant la date fixée (2).

Les récents changements apportés à la Loi fédérale sur les Territoires du Nord-Ouest compliquent encore davantage la compréhension de la notion de convention sur la confiance dans un gouvernement de consensus. La portée des droits du commissaire énumérés dans la loi fédérale a été élargie en avril 2014 pour inclure de nouveaux pouvoirs de nomination et de dissolution; le mode de sélection des personnes appelées à faire partie du Conseil exécutif, tel qu'établi par la loi territoriale, demeure la même.

L'énigme de la confiance était le thème d'une récente discussion organisée par le Groupe régional des Territoires du Nord-Ouest de l'Institut d'administration publique du Canada. On nous a demandé de débattre pour : qu'il soit résolu qu'il y a vraiment une convention sur la confiance dans un gouvernement de consensus. Ni ce débat ni le présent article ne régleront définitivement la question, et les points de vue exprimés ici sont seulement ceux de deux personnes et ne constituent en rien une position officielle; mais en explorant la question, nous aidons à départager les facteurs qui méritent peut être plus d'attention au moment de déterminer comment les conventions canadiennes en matière de gouvernement responsable s'appliquent au régime de gouvernement de consensus en place dans le Nord.

Retour du gouvernement responsable dans le Nord

Les gouvernements territoriaux au Canada sont établis par des lois fédérales plutôt que par constitutionnalisation. Il n'y a pas de Couronne du chef des Territoires du Nord-Ouest. Toutefois, au cours des 50 dernières années, et plus particulièrement au cours des 15 dernières, les trois gouvernements territoriaux ont acquis des pouvoirs semblables à ceux des provinces et sont généralement considérés comme des unités infranationales autonomes.

Le premier gouvernement responsable des Territoires du Nord-Ouest a vu le jour au XIXe siècle, après la vente de terres au Dominion du Canada par la Compagnie de la Baie d'Hudson, en 1869. C'est à ce moment qu'a été créé le Conseil des Territoires du Nord-Ouest, composé d'un amalgame de membres nommés et de membres élus. Ce conseil mixte a fini par céder sa place à un conseil entièrement élu et un système de gouvernement responsable est apparu en 1897, sous la direction du premier premier ministre des Territoires du Nord-Ouest, Frederick Haultain (3).

Après la création de l'Alberta et de la Saskatchewan en 1905, le gouvernement responsable des Territoires du Nord-Ouest a été mis en veilleuse : pendant près d'un demisiècle, le territoire a été administré par des fonctionnaires depuis Ottawa; en 1951, un premier représentant a été élu pour faire partie du Conseil territorial; dès 1960, le Conseil était constitué d'un nombre égal de membres élus et de membres nommés; et en 1975, enfin, tous les membres du Conseil étaient élus. Ce n'est que 12 ans plus tard, soit en 1987, que le commissaire a officiellement cessé d'assumer la présidence du Conseil exécutif. Depuis, nous, dans les Territoires du Nord-Ouest comme partout ailleurs dans les provinces et territoires, faisons une distinction entre l'organe exécutif officiel (le commissaire) et le pouvoir exécutif actif (le Cabinet) (4).

Le commissaire, bien qu'il exerce ses fonctions >, demeure le représentant du ministre fédéral responsable (5). Il vaut également la peine de rappeler que la locution utilisée dans la loi pour désigner l'assemblée législative territoriale--le >--a continué d'avoir cours depuis peu après la Confédération jusqu'au printemps dernier, soit à peine trois ans avant le cent cinquantième anniversaire du Canada.

Le gouvernement de consensus est le système législatif en vigueur dans les Territoires du...

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