Un directeur parlementaire du budget pour le Canada.

AuthorLevy, Gary

Le 14 mars 2008. le leader du gouvernement à la Chambre a annoncé la nomination du premier directeur parlementaire du budget du Canada, Kevin Page. La création de ce poste obligera le gouvernement à rendre des comptes plus rigoureux au Parlement en rendant plus transparent le cadre de planification financière et en perfectionnant l'examen des prévisions budgétaires. L 'article qui suit décrit le mandat et le processus de nomination de cette nouvelle fonction parlementaire et offre, en conclusion, quelques réflexions sur son avenir.

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La création du poste de directeur parlementaire du budget constitue certainement l'une des réformes parlementaires les plus radicales de l'histoire canadienne. Un sondage mené par la Banque mondiale et l'OCDE en 2003 a révélé que seulement 11 pays avaient greffé à leur assemblée législative un organisme de recherche budgétaire. La plupart des pays de la planète ont un régime congressionnel oø l'organe législatif a la possibilité de proposer des dépenses ainsi que des taxes et impôts.

Le [service de recherche budgétaire le] plus connu est évidemment le Bureau du budget du Congrès aux États-Unis, créé en 1974 et qui compte environ 230 professionnels. La Corée a créé un Bureau du budget de l'Assemblée nationale en 2003, qui compte 92 employés. Les Philippines ont créé en 1990 un Service de la planification et du budget du Congrès, qui compte une cinquantaine d'employés (1).

Du côté des régimes de gouvernement britannique, le Royaume-Uni a, en 2002, mis sur pied le Service d'examen, rattaché au Bureau des comités de la Chambre des communes. Sa mission consiste à donner des conseils sur les dépenses et sur les avant-projets de loi. Ce service compte sept professionnels, détachés d'autres services. Jusqu'ici, les activités de ce service semblent surtout axés sur l'amélioration de la présentation de l'information provenant du Trésor afin d'aider les parlementaires à discuter des budgets des dépenses (2).

Historique

Les parlementaires canadiens se préoccupaient depuis longtemps de la divergence entre les prévisions financières du ministère des Finances contenues dans le budget et les chiffres réels à la fin des exercices financiers. Une étude du ministère des Finances, effectuée par Ernst and Young en 1994, a permis d'apporter certaines améliorations à la méthodologie, mais la recommandation d'établir un organisme indépendant de prévision économique et financière n'a pas été retenue.

En 2004, Tim O'Neill a analysé la démarche suivie pour préparer les prévisions financières fédérales. Voici ce qu'il a conclu :

* Les projections des soldes budgétaires [...] ont été trop basses lors de chacun des 10 derniers exercices, l'écart moyen se situant à plus de 10 milliards de dollars.

* Le total des revenus a été sous-estimé lors de sept des huit derniers exercices [mais] cela n'a contribué que modestement à la sous-estimation du solde budgétaire lors des exercices récents.

* Les projections relatives aux dépenses de programmes totales ont contribué de façon plus constante à la sous-estimation du solde budgétaire, ayant été surestimées à neuf reprises au cours des dix derniers exercices (3).

Au nombre de ses recommandations, M. O'Neill a proposé de créer, au sein du gouvernement, un organisme qui se consacrerait aux répercussions budgétaires à moyen et à long terme qui découle de facteurs économiques et démographiques structurels. Il a suggéré que l'organisme soit rattaché à la Bibliothèque du Parlement ou au Bureau du vérificateur général, ou encore qu'il relève du Comité permanent des finances de la Chambre des communes.

En 2006, le programme électoral du Parti conservateur a proposé la création du Bureau parlementaire du budget pour fournir directement au Parlement une analyse objective de l'état des finances de la nation et des tendances de l'économie nationale. Cet engagement s'est finalement traduit par la création du poste de directeur parlementaire du budget dans le projet de loi C-2, Loi fédérale sur la responsabilité, première mesure législative déposée par le nouveau gouvernement en avril 2006.

Du projet de loi à la Loi

La Loi fédérale sur la responsabilité a fait l'objet de nombreux amendements durant les audiences d'un comité législatif de la Chambre, en mai et juin 2006, et celles du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, entre juillet et novembre 2006. Les dispositions concernant le poste de directeur parlementaire du budget ne constituaient qu'un petit segment de la Loi, et pas le plus controversé. Elles ont néanmoins fait l'objet d'un certain nombre d'amendements.

Lorsque le bibliothécaire parlementaire, William Young, a comparu devant le Comité sénatorial des affaires juridiques et constitutionnelles, il s'est dit convaincu que certaines modifications au projet de loi initial avaient précisé la relation de travail entre le bibliothécaire parlementaire et le directeur parlementaire du budget.

Il déplorait toutefois que le projet de loi C-2 ne contenait aucune disposition garantissant au DPB un accès gratuit aux données du gouvernement.

En somme, si nous devions payer les coûts exigés habituellement pour les séries de données de Statistique Canada, cela pourrait facilement représenter un fardeau financier excessif pour le nouveau directeur et par conséquent, pour la bibliothèque dans son ensemble. Il est facile de faire valoir que nous pourrions tout simplement faire une demande de fonds supplémentaires aux deux présidents, mais cela se ferait tout de même après coup et entraînerait inévitablement des concessions au détriment des autres besoins de la bibliothèque et des services que vous, les parlementaires, avez le droit d'obtenir de la bibliothèque. Là encore, nous risquons de voir le service que nous offrons aux parlementaires compromis à cause d'un besoin imprévu de fonds. Il serait certainement préférable que le projet de loi offre la même transparence en matière d'accès que celle qui est accordée aux fonctionnaires du Parlement. En particulier, j'aimerais citer à titre d'exemple la Loi sur le vérificateur général qui prévoit que le vérificateur général doit avoir gratuitement accès aux données du gouvernement (4).

Le Comité sénatorial a ajouté les mots > au paragraphe 79.3(1) pour caractériser l'accès à l'information financière qui doit être fourni au DPB par les ministères. L'amendement a été accepté par la Chambre.

Un autre amendement du Sénat a supprimé un paragraphe qui obligeait le DPB à calculer les coûts financiers des projets de loi émanant des députés. Il se limitera plutôt à calculer le coût de toute affaire relevant de la compétence du Parlement si un membre d'un comité le demande. L'amendement a été accepté par la Chambre.

Un amendement du Sénat concernant le processus de nomination n'a pas été accepté par la Chambre. Le...

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