Le directeur general des elections du Canada : responsabilites et independance.

AuthorCourtney, John C.

Deux grandes dates marquent l'histoire électorale du Canada. D'abord 1874, année de la mise en place du scrutin secret et des élections simultanées. Puis 1920, année de la création du Bureau du directeur général des élections. Bien que l'importance des changements de 1874 soit incontestable, le présent article traite exclusivement du directeur général des élections comme haut fonctionnaire du Parlement. Après l'annonce, à latin de décembre 2006, de la démission de Jean-Pierre Kingsley de son poste de directeur général des élections du Canada, ce bref résumé de cette charge vise simplement à > à son remplaçant l'évolution de la fonction au cours des 80 dernières années et de son importance capitale pour le système électoral du Canada.

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Aujourd'hui connu sous le nom d'Élections Canada, le Bureau du directeur général des élections confère au processus électoral une légitimité et une crédibilité inégalables. S'il en est ainsi, c'est largement parce que le poste a connu un très bon début en 1920 et que la loi portant création du Bureau a été bien conçue et bien exécutée. L'ensemble des provinces et des territoires se sont dotés d'une réplique institutionnelle assez proche d'Élections Canada. Des démocraties de longue date aussi bien que naissantes ont, à maintes reprises, montré qu'elles attachaient du prix aux avis et conseils et à l'aide de nos fonctionnaires électoraux au moment d'établir leur appareil électoral ou d'assurer la surveillance de leurs élections.

Le présent article traite plus précisément de cinq aspects du Bureau du directeur général des élections : ses origines, son indépendance, ses responsabilités, sa souplesse d'action et l'incidence de la Charte canadienne des droits et libertés sur le Bureau et sur la Loi électorale du Canada.

Origines

Le contexte des événements de 1917 et des années qui ont immédiatement suivi la guerre permet de mieux comprendre la création du Bureau du directeur général des élections. Lors de la Première Guerre mondiale, le gouvernement unioniste avait manipulé sans vergogne le processus électoral à ses propres fins partisanes. La Loi des élections en temps de guerre et la Loi des électeurs militaires de 1917 se sont avérées les lois électorales les plus controversées de l'histoire canadienne. Lors de l'élection de 1917, ces lois accordaient le droit de vote uniquement aux femmes ayant un parent dans l'armée canadienne ou britannique ainsi qu'à l'ensemble des soldats. Parallèlement, ces lois privaient du droit de vote les objecteurs de conscience et les sujets britanniques naturalisés après 1902, qui étaient nés dans un pays ennemi ou qui parlaient habituellement la langue d'un pays ennemi. Il s'agit d'un épisode peu reluisant de l'histoire électorale du Canada. En 1920, à l'approche d'autres élections, il était devenu évident que le statu quo n'était plus acceptable.

Vers 1920, d'autres facteurs étaient également en train de paver la voie à des changements considérables dans l'administration des élections. Divers partis provinciaux de fermiers et les Progressistes avaient solidement appuyé les réformes destinées à rendre le système électoral plus juste et plus transparent. Des groupes de femmes avaient milité avec succès en faveur du droit de vote pour les femmes en déclarant ouvertement que celui-ci contribuerait considérablement à assainir le système politique. Dans un tel contexte, il était tout à fait logique de créer un poste de directeur indépendant et neutre, chargé de surveiller l'administration des élections. En 1920, il était devenu évident que l'opinion publique était prête à accepter des changements importants à cet égard. De plus, comme l'électorat allait effectivement doubler de taille en raison de la participation des femmes, l'organisation des élections deviendrait soudainement une entreprise beaucoup plus vaste et compliquée que par le passé.

Par conséquent, pour assurer une organisation électorale qui se distinguerait par son efficacité et son équité administratives de même que par son impartialité institutionnelle, on a créé, il y a près d'un siècle, le Bureau du directeur général des élections.

Indépendance

Dès le début, l'officier électoral général (comme on l'appelait à l'époque) devait être, pour reprendre les paroles du ministre responsable du dépôt du projet de loi, > (1). En tant que haut fonctionnaire du Parlement, le directeur général des élections devait être choisi par la Chambre des communes et relever directement de celle-ci par l'intermédiaire du président. Depuis 1920, chaque directeur général des élections (il est étonnant de constater que, même si ce poste existe depuis plus de 85 ans, seulement cinq personnes l'ont occupé) a été nommé par...

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