Evolution du gouvernement responsable dans les Territoires du Nord-Ouest 1976-1998.

AuthorLewis, Brian

Brian Lewis et sa famille vivent dans le Nord depuis 1963. Apres avoir travaille pendant plus de 20 ans comme fonctionnaire, M. Lewis a siege comme depute de Yellowknife-Centre de 1987 a 1995.

Il y a 150 ans cette annee qu'un gouvernement responsable etait etabli au Canada, mais ce n'est que plus recemment que cette question a ete reglee dans les Territoires du Nord-Ouest. En effet, les Territoires sont demeures sous le controle direct de l'Etat federal pendant plus de 100 ans apres la Confederation. Le present article relate le combat mene par les habitants des Territoires du Nord-Ouest pour obtenir un gouvernment responsable et developper des institutions parlementaires qui refletent leur histoire et leurs traditions.

L'histoire des Territoires du Nord-Ouest est dominee depuis plus d'une centaine d'annees par la lutte pour l'obtention d'un gouvernement responsable. Leur immense etendue, l'eparpillement de la population, les riches ressources qu'on etait cense y trouver et l'importance de cette region pour les objectifs strategiques nationaux expliquent pourquoi on a juge qu'il etait dans l'interet du pays que les Territoires demeurent sous le controle direct de l'Etat federal pendant la majeure partie de cette periode. Ce n'est qu'en 1975 que les Territoires ont pu compter sur un premier Conseil territorial entierement elu (15 membres). Auparavant, c'etait un groupe compose d'elus et de Canadiens eminents nommes par le gouvernement federal qui dirigeait les destinees du tiers du territoire du Canada.

Jusqu'en 1975, le commissaire des T.N.-O., qui est nomme par le gouvernement federal, occupe egalement les fonctions de president, de premier ministre et de lieutenant-gouverneur. C'est la 8e legislature, dont les membres sont tous deputes, qui commence son mandat en choisissant le premier president elu. Il s'agit de David Searle, avocat de Yellowknife. Le pouvoir executif demeure toujours entre les mains du commissaire, qui est aide d'un commissaire adjoint et d'un autre assistant. En 1975, deux deputes se joignent aux trois commissaires nommes au sein du Comite executif. Il s'agit d'Arnold McCallum, ancien directeur d'une ecole secondaire de Fort Smith, et de Peter Ernerk, excellent traducteur-interprete de Rankin Inlet. Il serait faux de pretendre qu'il s'agit la d'une initiative audacieuse des deputes, malgre leur revendication d'un pouvoir accru. L'evolution du gouvernment responsable dependait toujours principalement des instructions que le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien (AINC) donnait au commissaire.

Bien sur, ce dernier beneficie, au sein du ministere des Affaires indiennes et du Nord canadien, d'un statut equivalent a celui d'un sous-ministre, puisqu'il conseille le ministre sur les mesures a prendre dans le Nord. Il est aussi preferable qu'il en soit ainsi! En effet, les ministres des ANIC ne demeurent pas longtemps en poste a l'epoque et il est on ne peut plus crucial que le Nord transmette des orientations claires.

L'annee apres que le ministre des AINC d'alors, Judd Buchanan, informe le commissaire qu'il peut nommer deux deputes au sein du Comite executif, une demande est adressee a son successeur, Warren Allmand, pour en ajouter un autre. Ainsi, on etablirait un equilibre entre les membres elus et les membres nommes: trois de chaque cote. Le troisieme membre elu choisi par le caucus est un ingenieur minier de Yellowknife: Dave Nickerson. C'est lui qui va bientot provoquer la prochaine bataille constitutionnelle. Le commissaire attribue les portefeuilles aux membres elus de la meme facon qu'un premier ministre provincial. Il nomme egalement les dirigeants des ministeres. M. Nickerson souhaite que les ministres puissent choisir eux-memes leur personnel. Meme si les precedents constitutionnels ne lui donnent pas raison, il demissionne pour defendre ce principe. A la demande du caucus, il est remplace par Tom Butters, editeur de journal d'Inuvik, qui representera cette circonscription jusqu'a sa retraite en 1991.

Meme si le Conseil territorial comprend 15 membres et que des elus participent dorenavant aux decisions de l'executif, de nombreux dirigeants du Nord contestent toujours la legitimite du gouvernement territorial. En effet, quoique neuf des membres elus soient des Autochtones, de nombreux Denes, Metis et Inuit estiment que la forme et le fonctionnement du gouvernement leur ont ete imposes et qu'ils ne tiennent souvent pas compte de leurs traditions.

La decision du Conseil de se baptiser lui-meme > et de donner le titre de > aux membres elus du Comite executif suscite donc une grande consternation. Les organisations autochtones s'opposent farouchement a ce changement de nom et tant la Societe Radio-Canada que les medias ecrits refusent d'utiliser les nouveaux titres. Le principal texte constitutionnel regissant les Territoires du Nord-Ouest est la Loi sur les Territoires du Nord-Ouest, qui enonce clairement que l'organisme legislatif est appele un conseil et que le pouvoir executif est assume par le commissaire. Comme il arrive souvent dans les dossiers constitutionnels, le temps contribue a apaiser ce debat et l'usage legitime les nouvelles designations. Malgre l'adoption eventuelle des nouveaux noms par les medias et leur acceptation par le grand public, de nombreux dirigeants autochtones du Nord previennent alors les autorites que l'evolution rapide vers un gouvernment provincial nuit aux negociations sur leurs propres revendications. Leurs demarches aupres de Warren Allmand provoquent vite l'envoi d'une lettre au commissaire pour lui demander de cesser d'utiliser les titres choquants, puisqu'ils ne sont pas constitutionnels. Bien sur, le commissaire Stuart Hodgson et son adjoint John Parker se plient immediatement a cette demande, mais ils ne peuvent poser d'autre geste. L'usage est maintenant etabli. Par consequent, lorsqu'ils peuvent le faire sans risque, ils recommandent au ministre d'accepter ces changements.

Les mesures energiques prises par les 15 membres elus pour obtenir un gouvernment responsable ont toutefois des retombees malheureuses. Deux membres denes, George Barnaby et James Wha-Shee, jugent que l'attribution de trop vastes pouvoirs au gouvernment territorial tend a lui conferer une legitimite immeritee, puisqu'il ne constitute pas leur gouvernement. Ils demissionnent donc tous les deux. C'est a ce moment-la qu'a lieu l'Enquete sur le pipeline de la vallee...

To continue reading

Request your trial

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT