Groupes d'intérêt et comités parlementaires : comment égaliser les chances.

AuthorMarlin, Marguerite
PositionArticle vedette

Comme l'indique la toute dernière édition de La procédure et les usages de la Chambre des communes, les comités permanents du Parlement du Canada ont pour mandat général d'étudier les politiques ainsi que l'efficacité des ministères auxquels ils se rattachent (1). Pour remplir ce mandat, les comités peuvent convoquer des témoins non gouvernementaux pour recueillir des informations nécessaires à leurs études et mener des consultations pour juger du bien-fondé des politiques proposées ou existantes. Au Canada, à l'exception du Comité permanent des finances (qui tient aussi des audiences prébudgétaires), les activités officielles des comités parlementaires qui comportent des témoignages de représentants non gouvernementaux adoptent deux formes principales : l'étude d'avant-projets de loi et la réalisation d'études donnant lieu à la production de rapports de comité. Ces deux activités offrent l'occasion aux organisations non gouvernementales de faire part de leur point de vue. Cependant, on observe depuis longtemps au sein de certains groupes d'intérêt au Canada une nette préférence sur le plan stratégique pour la tenue de réunions informelles avec des ministres du Cabinet ou d'autres politiciens influents, plutôt que des présentations en comité; l'efficacité de la première surpasse de loin celle de la seconde (2). En conséquence, les groupes d'intérêt n'ayant pas les ressources suffisantes pour investir dans la florissante économie des lobbyistes-conseils et dans d'autres stratégies de réseautage coûteuses sont désavantagés au royaume de l'influence sur les politiques (3).

La manière d'augmenter l'effet potentiel des contributions non gouvernementales à l'élaboration des politiques par l'intermédiaire des comités parlementaires s'articule autour de la fonction du comité étudiée. Des deux fonctions qu'assument les comités permanents de la Chambre au Parlement du Canada, c.-à-d. les examens de projets de loi et les études en comité, la dernière se trouve nettement favorisée comme outil de réforme par l'emprise ferme de la discipline de parti au Canada et le calendrier des examens législatifs en comité. Cependant, le pouvoir transformateur des études en comité, pour s'accroître, exige la solution aux deux questions suivantes : la nature ouverte de nombre de ces études (qui réduit le potentiel d'utilisation de telles études lors de l'élaboration de mesures législatives) et l'incapacité des mécanismes de suivi de susciter une action gouvernementale officielle par suite des rapports d'étude des comités.

Dans cet article, l'auteure met à profit des entretiens avec trois témoins non gouvernementaux du secteur de l'environnement ayant comparu devant des comités parlementaires au cours des dernières années : Christine Wenman d'Ecology North, Bill Eggertson de l'Association canadienne pour les énergies renouvelables et Martin von Mirbach de WWF-Canada, pour illustrer certaines des frustrations ressenties dans les rangs des représentants non gouvernementaux après leur témoignage dans le cadre d'études de comité (4). On peut dégager deux conclusions de cette analyse : d'abord, il faudrait concevoir pour les comités des mécanismes combinant le caractère ponctuel des rapports et la spécificité de l'étude des projets de loi afin d'éviter des études trop vastes; ensuite, l'incapacité continuelle d'obliger le gouvernement à répondre aux rapports des comités compromet inutilement la capacité des comités parlementaires à remplir leur mandat.

Les réformes qu'ont connues les comités parlementaires au cours de l'histoire du Canada ont été décrites de manière experte par Jack Stilborn (5), et ont fait l'objet de brefs articles par Christopher Garner, publiés dans des éditions antérieures de cette publication (6). La narration de l'histoire qui a façonné les processus et les protocoles courants des comités parlementaires est ainsi largement confiée à ces autres articles, sauf en ce qui concerne les changements considérés comme les plus pertinents au mouvement de transformation proposée.

Fonctions des comités permanents et acteurs non gouvernementaux

Les deux principales fonctions menées par les comités permanents dans le cadre desquelles les acteurs non gouvernementaux peuvent user de leur influence sont l'examen des projets de loi et les études menant à la production de rapports, chacune ayant des structures institutionnelles bien distinctes comme outils de changement. L'examen de projets de loi est propice à la formulation de points de vue très précis et centrés sur une politique bien délimitée (alors que ce n'est pas souvent le cas des rapports de comité); toutefois, les représentants invités à témoigner à ce stade se heurtent à une fidélité inflexible du gouvernement aux détails de la politique qui, dans presque tous les cas, a été étudiée et approuvée par les comités exécutifs et par au moins une des Chambres du Parlement (haute, basse ou les deux). Dans la plupart des cas, les projets de loi ne sont renvoyés à un comité qu'après la deuxième lecture, ce qui limite d'autant les possibilités d'amendements de fond. Les consultations...

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