Participation electorale : le cas de Scarborough-Rouge River.

AuthorLee, Derek
PositionCase study

Au cours de la 40e élection générale, le 14 octobre 2008, la participation électorale au niveau national est tombée au plus bas niveau jamais enregistré, soit à 58,8% des électeurs inscrits. Il s'agit d'une réduction de 5,9 points de pourcentage par rapport à la 39e élection générale. Le même phénomène s'est produit dans la circonscription de Scarborough--Rouge River; de fait, la participation électorale y a atteint un creux sans précédent de 47,5 %, le plus bas de Toronto et le dixseptième au pays. Pour la première fois dans l'histoire de la circonscription, plus de la moitié des électeurs inscrits n'ont pas voté. Le présent article porte sur les causes éventuelles de la faible participation électorale au pays en utilisant la circonscription de Scarborough--Rouge River comme modèle. Les auteurs proposeront quelques raisons expliquant un tel déclin.

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La circonscription électorale fédérale de Scarborough--Rouge River représente un cas intéressant puisqu'il s'agit de la circonscription la plus peuplée de Toronto et que le nombre d'électeurs inscrits s'accroît constamment. Située dans la partie est de Toronto, au nord de l'autoroute 401, elle présente des caractéristiques qui la distinguent des autres grands centres urbains du pays. Quatre-vingt-neuf pour cent de ses habitants appartiennent à une minorité visible, 68 % sont des immigrants, et 23,6 % sont des jeunes, ce qui est élevé par rapport à la moyenne nationale, et les communautés asiatique du sud et chinoise réunies représentent 61% de la population.

Le taux de participation de Scarborough--Rouge River à l'élection fédérale de 2008 a été comparé à ceux de Toronto, de l'Ontario et du Canada. Ce faisant, on a constaté que cette circonscription avait non seulement connu un taux de participation plus faible que ces trois entités, mais aussi occupé à ce chapitre le dernier rang parmi les 23 circonscriptions torontoises et l'avant-dernier parmi les 106 circonscriptions ontariennes. D'ailleurs, le taux de participation de Scarborough--Rouge River a été inférieur à ceux enregistrés au niveau tant municipal que national lors des sept dernières élections fédérales. Les données indiquent qu'avec la chute progressive du taux de participation, la différence en points de pourcentage entre celui de Scarborough--Rouge River et ceux de Toronto et du Canada continue de s'élargir à chaque élection. Pour établir quels bureaux de scrutin de la circonscription avaient enregistré les taux de participation les plus faibles, on a comparé taux de participation de chacun à celui de Toronto dans son ensemble.

Participation des électeurs ayant entre 18 et 24 ans

Au Canada, les jeunes électeurs (électeurs inscrits ayant entre 18 et 24 ans) semblent être moins nombreux à aller voter ces dernières années. La constatation que le taux de participation des jeunes électeurs est inférieur à celui de leurs homologues plus âgés, commune à bon nombre d'études antérieures sur la participation électorale, a été confirmée par des études récentes. De plus, cette tendance semble se manifester dans presque toutes les démocraties établies oø la question a été étudiée. Dans un sondage oø l'on a interrogé le même nombre d'électeurs et de non-électeurs, on a constaté que le taux de participation à la 37e élection générale n'était que de 22,4 % chez les jeunes de 18-20 ans et de 25 % chez ceux de 18-24 ans. Comparativement au taux de participation élevé des électeurs de 58 ans et plus (81,5 %), celui des jeunes électeurs était inférieur de 36,2 points de pourcentage par rapport au taux de participation national (61,2 %) en 2000. Ainsi, lorsqu'on compare les électeurs de moins de 25 ans à ceux de 65 ans et plus, il y a un écart de 10 à 15 points de pourcentage entre ces deux groupes pour ce qui est de leur participation aux élections (1).

Pourquoi la participation électorale diminue-t-elle chez les jeunes? Les spécialistes en sciences sociales expliquent ce phénomène en se basant sur la théorie du cycle de vie, selon laquelle la tendance naturelle à voter augmenterait avec l'âge. Mais, en fait, les jeunes électeurs voteraient de moins en moins, surtout par rapport à ceux des générations précédentes. Ce déclin peut découler du fait que l'engagement civique est à la baisse chez les jeunes. Dans le présent contexte, l'engagement civique fait référence aux électeurs jouant un rôle actif dans la vie sociale et politique d'une communauté (2). Les électeurs ont plus de chances de participer aux élections lorsqu'ils s'impliquent dans les activités politiques de leur collectivité. En d'autres mots, les citoyens actifs d'une collectivité s'intéresseront au processus politique, seront bien renseignés sur ce sujet et donc plus enclins à participer aux élections. Peut-être serait-il pertinent de vérifier si les jeunes jouent un rôle actif dans la vie sociale et politique de la circonscription avant de demander s'ils ont participé aux élections fédérales de 2008.

Cet effet générationnel était manifeste lorsqu'on a observé le comportement de l'électorat canadien durant les neuf élections générales qui se sont déroulées entre 1968 et 2000. De fait, on a constaté que la participation électorale moyenne était tombée à 67 % durant les trois élections tenues entre 1990 et 2000 après avoir atteint 74 % lors des six tenues avant 1990. Ce recul de sept points de pourcentage entre 1990 et 2000 pourrait être attribué à l'effet générationnel. En examinant sur plusieurs générations la propension d'une cohorte à voter, on a constaté qu'au même âge, le taux de participation de la génération du baby-boom (enfants nés entre 1945 et 1959) est inférieur de 2 ou 3 points de pourcentage à celui de la génération précédente (enfants nés avant 1945) (3). Les générations subséquentes ont aussi manifesté cette tendance. Le taux de participation de la cohorte de la génération X (enfants nés durant les années 1960) a reculé de 10 points de pourcentage par rapport à la génération du baby-boom. La cohorte née depuis les années 1970 a elle aussi enregistré un recul de dix points de pourcentage par rapport à la génération X. En comparant la plus jeune génération à la plus vieille, on observe que la propension à voter fléchit de plus de 20 points de pourcentage pour la même tranche d'âge. La baisse de la participation électorale pourrait aussi résulter du remplacement générationnel. Les membres de la génération succédant à celle du baby-boom représentaient environ le quart (28 %) de l'électorat en 1988 et la moitié (49 %) en 2000. Inversement, les membres de la génération qui a précédé celle du baby-boom représentaient 35 % de l'électorat en 1988 et seulement 22 % en 2000. Par conséquent, les membres de la génération qui a succédé à celle du baby-boom deviennent de plus en plus nombreux et votent moins. Ici, il est raisonnable de conclure non seulement que les jeunes rotent moins, mais aussi que chaque nouvelle génération vote moins que la précédente.

Les données indiquent aussi qu'on compte beaucoup sur les cohortes plus âgées pour maintenir le taux de participation à des niveaux acceptables. Invariablement, l'effet générationnel réduira le taux de participation global, une tendance qui risque de se maintenir. Il est certain que Scarborough--Rouge River n'est pas à l'abri de cette tendance, sa population ayant trois ans de moins que la médiane nationale. Les études effectuées en sciences sociales indiquent que le déclin du taux de participation chez les jeunes a un effet lors des élections fédérales, y compris dans Scarborough--Rouge River.

Accessibilité ou proximité des bureaux de scrutin

On définit...

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