Les plus anciens règlements parlementaires au Québec et au Canada.

AuthorBlais, Christian
PositionArticle vedette

Du XIVe siècle jusqu'au début du XIXe siècle, les usages parlementaires de la Chambre des communes relèvent davantage de la coutume et de la pratique que de la règle écrite explicite (2). Ce n'est qu'en 1810 que les Communes codifient officiellement quelques-unes de leurs procédures à titre de Standing Orders (3).

La connaissance des usages parlementaires avant 1810 reposait en grande partie sur divers ouvrages publiés à compter du XVIe siècle. Parmi ceux-ci figurent Order and Usage de John Hooker (1572), De Republica Anglorum de Thomas Smith (1583), The Manner How Statutes are Enacted in Parliament by Passing of Bills de William Hakewill (1641), Lex parliamentaria attribué à George Petyt (1689) et les travaux de John Hatsell, à commencer par A Collection of Cases of Privilege of Parliament, from the earliest records to 1628 (1776). On sait aussi que ces publications faisant autorité (4) circulent en Amérique. Le fait d'avoir en partage une administration coloniale britannique et ces sources de procédure explique pourquoi la procédure parlementaire est, dans ses fondements, la même d'une colonie à l'autre.

Au XVIIIe siècle, on trouve une dizaine de règlements écrits régissant les travaux parlementaires de la Nouvelle-Écosse, de l'île Saint-Jean (Île-du-Prince-Édouard), de la Province de Québec, du Nouveau-Brunswick, du Haut-Canada et du Bas-Canada. Les usages et les pratiques parlementaires ont ainsi été codifiés en Amérique du Nord britannique avant de l'être à la Chambre des communes britannique.

L'objet de cet article est de brosser un portrait des plus anciens règlements écrits des premières >. Il s'agit par la même occasion de présenter deux règlements inédits de la Province de Québec et du Bas-Canada.

Le règlement de la Chambre d'assemblée de la Nouvelle-Écosse

Les traditions parlementaires de la Nouvelle-Écosse sont les plus anciennes au Canada. De 1719 à 1758, les membres du Conseil des Douze--doté des pouvoirs législatif et exécutif pour administrer la province--reprennent des éléments de la procédure employée à Westminster.

Par exemple, un membre agit comme président pour diriger les travaux de la Chambre, des motions sont présentées, un procès-verbal est dressé et des comités pléniers sont créés pour étudier les ordonnances. Aucun règlement formel n'est consigné cependant dans les procès-verbaux de ce > (5).

Le 2 octobre 1758, les 22 premiers députés de la Chambre d'assemblée de la Nouvelle-Écosse se réunissent. Dans l'immédiat, ils ne jugent pas opportun d'adopter des règles pour encadrer leurs travaux. Ce n'est que le 5 novembre 1763 que quatre résolutions sont adoptées, par les députés de la 3e législature, pour servir de règles de fonctionnement (6).

Les quatre articles de ce règlement ont pour unique objectif de réduire les cas d'absentéisme. Afin de favoriser >, le président pourra, sous peine de censure, requérir la présence d'un député absent (7). Après quoi, celui qui fera défaut de se présenter verra son siège déclaré vacant, à moins qu'il ait une excuse jugée valable par l'Assemblée. Désormais aussi, les élus qui voudront s'absenter devront préalablement en demander l'autorisation au président.

Vingt ans plus tard, au cours de la session de 1784, une quinzaine de > sont adoptés. Ceux-ci concernent l'enregistrement des votes nominaux et des motions, la diffusion du journal de l'Assemblée, le calcul de la présence des députés (qui doivent siéger de l'ouverture d'une séance jusqu'à son ajournement) et l'allocation versée (8). Le public obtient la permission d'assister aux travaux parlementaires, mais les élus se réservent le droit de siéger à huis clos. Quant aux membres qui accepteront dorénavant une charge publique, ils perdront leur siège, à moins qu'un vote de la Chambre ne leur accorde ce privilège. Enfin, les députés révoquent le 14e article qui leur interdisait de prendre des notes des discours d'autrui ou d'en parler en dehors de la Chambre (9).

À cela s'ajoute, toujours en 1784, une compilation intitulée Rules and Orders agreed on by the House of Assembly (10). Ce manuscrit, constitué de 19 articles, porte la signature du greffier Richard Cunningham. Aucune des règles permanentes en vigueur à la Chambre basse ne figure dans ce document. En son essence, cet autre ensemble de règles disciplinaires préside au bon déroulement des débats parlementaires. Il y est question de décorum et du processus entourant l'adoption des projets de loi.

Ces différents exercices de codification se déroulent à la 17e et dernière session de la 5e Assemblée générale, élue en 1770 et dissoute en 1785. La Nouvelle-Écosse est alors en pleine mutation. L'arrivée de milliers de loyalistes, à compter de 1783, fait doubler la population de la province. Cela reste en grande partie hypothétique, mais peut-être ces efforts de codification visent-ils simplement à faire en sorte que les futurs députés loyalistes se conforment aux traditions parlementaires néo-écossaises.

Le règlement de la Chambre d'assemblée de l'île Saint-Jean (Île-du-Prince-Édouard)

L'île française de Saint-Jean (renommée l'Île-du-Prince-Édouard en 1798) est annexée au gouvernement de la Nouvelle-Écosse avec la Proclamation royale de 1763 (11). Les 67 lots de l'île sont bientôt divisés entre une centaine de propriétaires non-résidents. Cependant, les colons qui y étaient établis ne pourront pas élire de représentants au Parlement de la Nouvelle-Écosse, car le cens d'éligibilité est réservé aux seuls propriétaires protestants résidents.

Dès 1769, par un ordre en conseil de la Couronne, l'île Saint-Jean est détachée de la Nouvelle-Écosse. Par sa commission, le nouveau gouverneur Walter Patterson est autorisé à instituer une Assemblée législative lorsque les circonstances le permettront. Jusqu'en 1773, le territoire est administré par un >.

Une assemblée de 18 membres est élue et siège à compter du 7 juillet 1773. Un comité formé de six députés est bientôt chargé >. Pendant cette session qui ne dure que 10 jours, il n'y a pas de suite à cette motion. À la session suivante, le 5 octobre 1774, une résolution est adoptée selon laquelle >. Malgré ces indications, aucun règlement n'est consigné dans les procès-verbaux. On réfère de nouveau aux > le 1er juillet 1776, mais ceux-ci ne paraissent pas non plus dans le journal.

Enfin, en date du 4 février 1796, une motion du député Robert Hodgson a pour objet d'ajouter un article aux règlements de la Chambre. Il est résolu que le siège d'un député absent pendant deux sessions consécutives sera déclaré vacant, s'il n'a pas demandé préalablement à la Chambre la permission de s'absenter (12). Cette nouvelle règle est entrée en vigueur dès le 13 février suivant afin de déclarer vacant le siège de James Campbell.

À noter que cette Assemblée, élue en 1790 et dissoute en 1802 seulement, demeure loyale au...

To continue reading

Request your trial

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT