La responsabilite de la societe de classification en droit maritime Canadien.

AuthorBraen, Andre

Classification societies play an important role in promoting maritime safety. These companies are often called upon to act on behalf of shipowners or insurance firms to classify vessels that are in the process of being built or those that are already being operated. In addition to their classification roles, these companies are often vested with the authority by governments to control vessels that visit their ports and to ensure that these vessels are in conformity with national and international norms governing maritime law. The conformity of these vessels is validated by the issuance of conformity certificates. What kind of liability can be invoked against these companies in case of fault or negligence on their part? This question lies, in the Canadian context, within the bounds of federal maritime law, which in turn demands that the applicability of the common law be duly considered.

In the case of an allegation of breach of contract, the terms of the contract and the intentions of the parties contained therein are determinative and have to be carefully scrutinized to define the obligations and duties that are incumbent on each party. Furthermore, the liability in tort of a classification society can be successfully invoked if and only if proof of the existence of a duty of care and an obligation of due diligence on the part of the society in question are irrevocably established. This is in keeping with the desire to guard against the risk of imposing an indeterminate and inordinate liability upon classification societies that could result in opening the floodgates to proceedings against these companies. Finally, even when a classification society acts as a delegate of the Canadian state, it can only be found liable if it has acted in bad faith.

Les societes de classification sont des acteurs importants en matiere de securite maritime. Ces societes sont souvent appelees a agir au nom d'un armateur ou d'une compagnie d'assurance pour classifier un batiment en voie de construction ou en cours d'exploitation. En plus de ce role de classification, ces societes sont souvent habilitees par les etats a controler l'etat de navigabilite des navires battant leur pavillon et a garantir la conformite de ceux-ci aux normes nationales et internationales regissant le droit maritime. La conformite de ces navires est validee par la delivrance de certificats dument emis a cet effet. Or, quel regime de responsabilite s'applique aux societes de classification en cas de manquements dans l'accomplissement de leurs fonctions, en raison d'une faute ou encore par leur negligence? Au Canada, cette question releve du droit maritime federal, lequel exige la consideration du droit anglais applicable en la matiere.

En matiere contractuelle, il faut s'en tenir aux termes du contrat liant la societe de classification a une autre partie, ainsi qu'aux intentions qui en decoulent, pour deduire la nature et l'etendue des obligations qui incombent a chaque partie. D'autre part, la negligence d'une societe de classification ne peut donner lieu a un recours fonde sur la responsabilite delictuelle que si et seulement si une preuve de l'existence d'un devoir ou une obligation de prudence de celle-ci est dument demontree. Cette exigence s'inscrit dans l'optique de vouloir eviter d'instaurer un regime de responsabilite indeterminee envers les societes de classification. Elle sert egalement a prevenir l'eventuelle avalanche de poursuites judiciaires injustifiees qui pourraient autrement etre intentees a l'encontre de ces societes. Enfin, meme lorsqu'une societe de classification agit a titre de delegue de l'Etat, sa responsabilite ne pourra etre soulevee qu'en cas de mauvaise foi de sa part.

Introduction I. Le droit applicable II. La responsabilite contractuelle III. La responsabilite delictuelle IV. La responsabilite du delegue Conclusion Introduction

Parmi les nombreux acteurs qui interviennent dans le domaine de la securite maritime (1), il faut mentionner la societe de classification. Apparue au dix-huitieme siecle (2), d'abord pour assister l'armateur dans la mise a niveau technique de son batiment, puis pour ensuite informer l'assureur de l'etat de navigabilite d'un navire, la societe de classification joue aujourd'hui un role double (3). Au plan prive, elle est appelee, le plus souvent a la demande de l'armateur ou de l'assureur (4), a classifier le batiment en voie de construction ou en cours d'exploitation (5). Pour ce faire, elle applique ses propres standards techniques et joue a ce niveau un role normatif significatif compte tenu de la pluralite des normes relatives a l'etat de navigabilite et a la securite du navire applicables en la matiere. a ce processus de classification s'ajoute celui de la certification (6). Au plan public, de nombreux d'etats habilitent aujourd'hui certaines societes de classification a controler en leur nom les navires battant leur pavillon, ainsi qu'a attester la conformite de navires selon les standards nationaux et internationaux (7) au moyen de la delivrance de certificats appropries (8). Normalement, la societe de classification est une entreprise independante a but non lucratif. Sa neutralite exige d'elle qu'elle n'exploite ni ne gere de navires. Les plus importantes societes de classification se sont regroupees au sein d'une organisation internationale, l'International Association of Classification Societies (9), laquelle vise a implanter un processus d'uniformisation des standards utilises par ses membres afin d'accroitre leur credibilite. La classification ne constitue pas une obligation legale mais bien une obligation pratique, et l'armateur reste libre de transiger avec la societe de classification de son choix. Il peut meme changer de societe, mais la methode du class shopping reste mal percue, dans la mesure ou elle se traduirait par l'application de standards moins rigoureux et, par analogie a la pratique du pavillon de complaisance, par l'instauration de la classification de complaisance.

En plus d'assumer des responsabilites deleguees par les etats, la societe de classification intervient d'abord sur le plan prive, a la demande de l'armateur desireux qu'une classe soit attribuee a son navire ou a celle de l'assureur voulant apprecier le risque d'assurer ou non un batiment et ainsi decider du taux de la prime a payer. Ce faisant, la societe agit a l'interieur des relations qu'elle tisse avec ses clients. Elle peut, en accomplissant ses fonctions, commettre une faute, agir avec negligence ou causer un prejudice et ainsi engager sa responsabilite civile, tant sur le plan contractuel que sur le plan extracontractuel. Il s'agit d'une responsabilite qu'elle aura par ailleurs tente d'attenuer au moyen de l'inclusion au contrat de clauses d'exoneration. Quel est alors, en droit maritime canadien, le regime de responsabilite applicable a la societe de classification, tant au niveau contractuel que delictuel (10)? Qu'arrive-t-il lorsque la responsabilite de la societe emerge alors qu'elle agit a la fois au niveau prive et a titre de deleguee de l'etat dans la delivrance de certificats de conformite aux navires? Ces questions sont d'actualite, d'autant plus que plusieurs catastrophes maritimes recentes ont implique des navires qui avaient pourtant fait l'objet d'inspections par des societes de classification (11). Apres avoir defini le droit applicable, nous insisterons donc sur les regles qui regissent la responsabilite de la societe de classification.

  1. Le droit applicable

    Au Canada, la navigation et la marine marchande relevent de la competence federale (12). Les provinces possedent quant a elles une competence legislative exclusive en matiere de propriete et de droits civils (13). De plus, le Canada etant un etat bijuridique en matiere de droit prive, la tradition civiliste s'applique au Quebec alors que la tradition de la common law s'applique dans les autres provinces. En cas d'exercice errone ou fautif dans l'accomplissement de leurs fonctions, quel sera alors le cadre de la responsabilite civile applicable aux societes de classification?

    En territoire canadien, lorsqu'un litige presente une composante maritime, c'est le <> qui doit trouver application. Par un curieux derapage qui neanmoins constitue l'etat actuel du droit au Canada en matiere maritime (14), la Cour supreme du Canada adopte invariablement une approche que l'on peut resumer de la facon suivante:

    1. Si une question maritime est soulevee dans un litige, sa solution au plan juridique decoule necessairement et obligatoirement du <>. Celui-ci releve de la competence legislative exclusive du Parlement federal en matiere de navigation et de marine marchande. Meme si le caractere maritime d'un litige peut paraitre evident, pour savoir si une question examinee releve bel et bien du droit maritime canadien, il faut que cette question soit entierement liee aux affaires maritimes au point de [egitimement faire partie du droit maritime canadien (15).

    2. Quant au contenu du droit maritime canadien, celui-ci comprend les lois et reglements federaux. En cas de silence du legislateur, un chef de reclamation tel qu'enumere au sous-article 22(2) de la Loi sur les CoursJederales (16) peut etre invoque. Ultimement, c'est l'ensemble des regles de droit maritime emprunte a l'Angleterre, englobant a la fois les regles et principes de l'amiraute et ceux de la common law, qui sont appliquees. Le droit maritime canadien est ainsi un droit uniforme, applicable dans tout le Canada par tout tribunal competent (17). Il ne comporte, sauf exceptions, aucune regle de droit provinciale (18).

    Les regles de la responsabilite applicables a une inspection, une certification ou un controle errone ou negligent d'un navire par une societe de classification constituent une question qu'un tribunal qualifierait, dans l'etat actuel du droit, de <>. Dans l'arret Monk, le juge Iacobucci affirma que <> (19). Dans l'arret Lloyd's Register North America c. Dalziel...

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